Elles ont connu l'exil, le déracinement, les camps de transit. Elles, ce sont les femmes de harkis , ces Français musulmans, supplétifs de l’armée française pendant la guerre d'Algérie.
En 1962, après la signature des accords d'Évian ouvrant la voie à l'indépendance, nombre de ces Algériens ayant servi la France, pas toujours par choix, ni par engagement, sont arrêtés, enlevés voire assassinés par le Front de libération nationale (FLN).
Seule une poignée d'entre eux, environ 20 000, sera rapatriée en France en 1962. Ils seront au total 41 000 en 1965. Parquées dans des camps de transit du sud de la France, ces familles algériennes se retrouvent dans un dénuement parfois total. Si les hommes sont employés le plus souvent comme ouvriers par l'Office national des forêts (ONF), les femmes, elles, sont reléguées au foyer. Invisibles ou presque. À quelques exceptions près.
Une vingtaine d'entre elles sont recrutées, notamment dans le camp de Rivesaltes, pour créer un atelier de tapis qui sera installé à Lodève, près de Montpellier.
Au fil des années, leur savoir-faire s'est allié aux techniques de tissage nées au XVIe siècle, sous Henri IV, pour créer des tapis qui ornent aujourd’hui les plus beaux palais de la République. Ces tisseuses algériennes sont devenues des licières d’exception.