Tout au long de la Conférence sur l’avenir de l’Europe, France 24 est parti à la rencontre des jeunes citoyens européens participant à l’évènement. Officiellement lancée le 9 mai 2021, la Conférence se présente comme un exercice de démocratie participative inédit offrant aux Européens des 27 États membres de faire entendre leur voix et d’exprimer leurs attentes vis-à-vis de l’Union (futureeu.europa.eu). Près de 800 Européens originaires des 27 pays de l’UE étaient concernés. Parmi eux, un tiers avait moins de 25 ans. Nous avons suivi à cette occasion quatre jeunes Européennes âgées de 16 à 22 ans, pour mieux connaître leurs attentes : qu'attendent-elles de l’Union en matière de migration, d'environnement, de santé, de frontières ou de climat ? Elles racontent leur expérience européenne et leur quotidien dans leurs pays respectifs, entre craintes et espoirs en une Europe meilleure.

Thilde

Suède

l’environnement au nom des siens

Thilde vit à Fågelmara, dans le district suédois de Karlskrona (port classé au patrimoine mondial de l’Unesco en 1998), au sud du pays et au bord de la mer Baltique. Les pays voisins directs de la Suède sont donc la Pologne, les pays baltes (Estonie, Lettonie et Lituanie), ainsi que la Russie. La capitale la plus proche de Fågelmara n’est pas Stockholm mais Copenhague, au Danemark.

La Suède est le troisième plus grand pays des 27 en termes de superficie mais aussi l’un des moins densément peuplés. Le pays compte plus de 10 millions d’habitants.

La Suède est entrée dans l’Union européenne le 1er janvier 1995, en même temps que la Finlande et l’Autriche, devenant ainsi le 15e pays de l’Union. Le référendum du 13 novembre 1994 est venu valider l’entrée du pays à hauteur de 52,2 %.

La Suède n’a pas adopté l’euro et a conservé sa monnaie, la couronne suédoise (SEK). C’est le résultat du référendum de septembre 2003 qui a vu l’adoption de la monnaie unique repoussée à 56,1 %. En cas de victoire du oui, l’euro aurait été adopté le 1er janvier 2006.

Malgré son voisinage avec la Russie, la Suède – comme la Finlande – a choisi de ne pas devenir membre de l’Otan, mais n’exclut plus cette possibilité depuis l’invasion de l’Ukraine par les forces de Moscou.

Thilde a 22 ans. Elle vit dans la ferme familiale près de Karlskrona, dans le sud de la Suède. Le pays est directement impacté par le changement climatique. Il a été gravement touché par des incendies sans précédent en 2018, qui ont vu environ 25 000 hectares de forêt partir en fumée. Si l’intervention de l’Union européenne a permis d’y mettre fin, les incendies de juillet 2018 restent gravés dans les mémoires et ont servi de déclic : l’environnement est devenu la préoccupation n°1 dans le pays.

“Difficile d’oublier le changement climatique, ici en Suède, on y est confrontés directement dans notre quotidien.”

Pour Thilde, il n’y a pas de temps à perdre : il ne faut pas se contenter de parler, mais se saisir du problème et agir au plus vite.

“Les incendies de 2018 ont marqué un moment-clé. Je me suis dit : ‘Nous devons arrêter ça et changer, maintenant’.”

Quand elle a été contactée pour participer à la Conférence sur l’avenir de l’Europe, Thilde n’y croyait pas vraiment. Mais elle y a vu l’opportunité de plaider pour le développement des transports publics en zone rurale afin de faire baisser l’utilisation de la voiture et de réduire ainsi les émissions de gaz à effet de serre. C’est un enjeu majeur pour ce pays scandinave, qui est l’un des plus grands d’Europe mais aussi l’un des moins densément peuplés. Sa proposition a été retenue et figure parmi les recommandations de cette Conférence sur l’avenir de l’Europe.

L’événement lui a également permis de s’ouvrir à d’autres problématiques environnementales, notamment à celles d’Européens vivant en zone urbaine.

À lire sur France 24 : Portrait : pour Thilde Karlsson, l'environnement au nom des siens

Peu à peu, la jeune Suédoise s’est prise au jeu : la Conférence lui a permis de gagner en assurance et en ouverture, avec à la clé de nouvelles amies acquises elles aussi à la question du climat.

“Quand le téléphone a sonné, je n’y croyais pas, j’ai cru à une escroquerie. Mais je pense que ce moment a changé ma vie. Je n'avais pas autant confiance en moi avant, ni autant d'amis…”


Camille

France

la lutte pour le handicap et une santé unifiée au sein des 27

Camille vit à Toulouse, dans le sud-ouest de la France.

La France est l’un des pays fondateurs de l’Union européenne. Elle a d’abord fait partie de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), regroupant également l’Italie, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas dès 1951, puis de la Communauté économique européenne (CEE) à la suite de la ratification du Traité de Rome, le 25 mars 1957.

La France figure parmi les 11 premiers pays de la zone euro créée en 1999.


Les voisins directs de la France sont l’Espagne et l’Italie au Sud ; la Suisse, l’Allemagne, le Luxembourg et la Belgique à l’Est.

Le pays compte plus de 67 millions d’habitants. C’est le pays le plus étendu des 27 (+ de 15 % du territoire de l’UE), devant l’Espagne et la Suède.

La France a vu naître de grands Européens, comme ses pères fondateurs, Jean Monnet et Robert Schuman, la première présidente du Parlement européen Simone Veil (1979-1982), l’ancien président de la Commission européenne Jacques Delors (1985-1995) ou les anciens présidents Valéry Giscard d’Estaing ou François Mitterrand.

Camille est lycéenne, elle a 16 ans et vit à Toulouse, dans le sud-ouest de la France. C’est sa mère qui l’a inscrite à la Conférence. Sa candidature a été retenue et elle est rapidement devenue ambassadrice de son groupe de travail, consacré à la santé. Avant la Conférence, celle qui est parmi les benjamines de l’événement était peu habituée aux thématiques européennes mais, en quelques mois, elle a pris ses marques au Parlement européen de Strasbourg.

“La Camille du mois de septembre était perdue, elle se disait : ‘Dans quoi ma mère m'a-t-elle embarquée ?’ Et la Camille de maintenant, elle se dit : ‘Heureusement que ma mère m’a poussée parce que c'est une expérience de fou'.”

Accompagnée de sa mère Stéverine, Camille a pris le temps d’apprendre et d’appréhender l’événement avant d’y trouver pleinement sa place. Elle a découvert un univers nouveau, des thématiques souvent complexes, et appris à jongler entre les cours (Camille passe le bac cette année), les devoirs et sa présence à la Conférence : l’année s’est écoulée sans temps mort.

“Il y a des moments où je me suis dit : ‘Là, j’arrête, je ne vais pas réussir à tenir le rythme avec le lycée à côté, les devoirs, les cours et les contrôles à rattraper’.”

Peu à peu, Camille a fait entendre sa voix et mis en avant des problématiques qui leur tiennent à cœur, à elle et sa mère : l’inclusion des handicapés dans la société et une santé unifiée au sein de l’Union.

À sur France 24 : Portrait : Camille, la santé et le handicap à cœur

Avant le Covid-19, la santé n’entrait que partiellement dans le domaine de compétence de l’Union, mais la pandémie a changé la donne. Le groupe auquel appartient Camille souhaite en profiter pour faire avancer le développement de soins pour tous au sein des 27 pays. Des recommandations du groupe Santé qu’elle a présentées au Parlement européen dans le cadre de la Conférence sur l’avenir de l’Europe. Pour elle, le temps presse et les politiques doivent prendre la thématique à bras-le-corps.





Zuzana

Slovaquie

l’Europe à cœur

Zuzana vit à Bratislava, la capitale de la Slovaquie. Les voisins directs de la Slovaquie sont la Pologne au Nord ; l’Ukraine à l’Est ; la Hongrie au Sud ; l’Autriche à l’Ouest et la Tchéquie (ex-République tchèque) au Nord-Ouest.

La Slovaquie compte une population de plus de 5 millions d’habitants.


Le pays est entré dans l’Union européenne le 1er mai 2004, après avoir déposé son dossier d’adhésion en juin 1995. La Slovaquie a rejoint l’UE en même temps que la Pologne, la Hongrie, la Slovénie, la République tchèque, Chypre, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie et Malte. Le pays a rejoint l’espace Schengen en 2007.

Le référendum d’adhésion a reçu un oui massif à 93,7 % les 16 et 17 mai 2003, mais le résultat est en trompe-l’œil : seuls 52,1 % des Slovaques en âge de voter y ont participé. C’est une constante dans ce pays régulièrement qualifié d’eurosceptique : les élections européennes y sont peu suivies et le pays remporte régulièrement le record de la plus faible participation au sein de l’Union (trois fois consécutives).

La Slovaquie est l’un des 19 pays membres de la zone euro. La monnaie unique a officiellement remplacé la couronne slovaque le 1er janvier 2009.

La Slovaquie est membre de l’Otan depuis le 29 mars 2004.

Zuzana est dans son élément au Parlement de Strasbourg. L’Europe et ses problématiques figurent au cœur de ses préoccupations : elle étudie les affaires européennes à Bratislava et va bientôt présenter une thèse sur l’efficacité de la représentation des jeunes au niveau européen. Un profil grâce auquel elle a été désignée ambassadrice de son pays au sein de cette Conférence sur l’avenir de l’Europe – chaque pays membre de l’Union ayant un représentant pour l’événement.

“Quand je pense qu'il y a à peine 30 ans, la Slovaquie n’était pas une démocratie et que, maintenant, je suis ici au Parlement européen, sans mandat d’élue, pour expliquer ce qu’attendent les Slovaques… C'est incroyable ! Si ça marche, je pense que ce sera le meilleur projet de tous les temps.”

À 22 ans, elle représente donc son pays, la Slovaquie, qui a intégré l’Union en 2004 et qui a, peu à peu, vu son enthousiasme européen s’effriter. Le pays d’Europe centrale a remporté à trois reprises le record du plus faible taux de participation aux élections européennes.

À sur France 24 : Portrait : Zuzana, Européenne convaincue en terre eurosceptique

“Je n’imagine pas d’autre institution capable de faire participer les citoyens à la prise de décision et d'écouter leurs besoins dans la vie réelle d'aujourd'hui.”

Pour lutter contre l’euroscepticisme, elle a pris son bâton de pèlerin l’été dernier afin de convaincre les Slovaques du bien-fondé de la participation à l’aventure européenne. Son discours à la tribune du Parlement européen en octobre dernier avait d’ailleurs marqué les esprits.

“C’est seulement en ayant une discussion directe avec les personnes eurosceptiques que nous pourrons les atteindre personnellement et leur faire comprendre que l’UE est là pour eux. L'UE doit leur prouver son rôle par ses actions, et non par des promesses vides.”

Engagée pour la liberté et la lutte contre les "fake news", elle fait figure d’Européenne convaincue. Son engagement en faveur de l’Union et sa liberté de ton en ont fait une figure de la Conférence qui, selon elle, ne doit pas en rester là : les recommandations des 800 citoyens doivent être mises en application par les dirigeants de l’UE.





Laura Maria

Italie

pour une Europe sans murs

Laura Maria vit à Prato, à une quinzaine de kilomètres de Florence, en Toscane. Les voisins directs de l’Italie sont la France à l’Ouest ; la Suisse et l’Autriche au Nord ; la Slovénie et les Balkans à l’Est. Mais l’Italie, en tant que pays méditerranéen, a aussi pour voisins les pays du Maghreb proches des côtes siciliennes : la Tunisie, la Libye ou encore l’Algérie.

Le pays compte un peu moins de 60 millions d’habitants.


L’Italie est l’un des pays fondateurs de l’Union européenne. Elle a d’abord fait partie de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) regroupant également la France, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas dès 1951, puis de la Communauté économique européenne (CEE) à la suite de la ratification du Traité de Rome, le 25 mars 1957.

L’Italie figure parmi les 11 premiers pays de la zone euro créée en 1999


Le pays a fourni de grands Européens. Parmi les fondateurs de l’Union, on cite souvent Alcide De Gasperi ou Altiero Spinelli. Deux Italiens ont pris la tête de la Commission européenne : Franco Maria Malfatti (1967-1970) et Romano Prodi (1999-2004). Antonio Tajani (2017-2019) et David Sassoli (2019-2022) ont présidé le Parlement européen. L'actuel président du Conseil, Mario Draghi, a dirigé la Banque centrale européenne de 2011 à 2019. Federica Mogherini a précédé Josep Borrell en tant que Haute représentante de l'Union pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité entre 2014 et 2019.

L’aventure strasbourgeoise de Laura Maria aurait pu ne jamais commencer. L’organisation souhaitant qu’un tiers des participants soient des jeunes âgés de 16 à 25 ans, son père a décidé de se désister pour lui laisser la place de bonne grâce. Laura Maria a saisi la balle au bond et s’est impliquée à 200 % dans l’aventure. Cet enthousiasme, Laura Maria, fraîchement diplômée d’anthropologie culturelle, le met au service de la Conférence et d’une certaine idée de l’Italie et de l’Europe, qu’elle souhaite ouvertes, accueillantes et responsables.

“Nous n'avons pas besoin de murs, ils ne sont d’aucune utilité. Nous avons seulement besoin d'une organisation dédiée à la politique migratoire qui soit gérée au niveau européen, et non au niveau national.”

Originaire de Prato près de Florence, Laura Maria a grandi dans un univers multiculturel qui l’a marquée à jamais. La ville toscane compte plus de 120 nationalités et l’une des plus grandes communautés chinoises d’Europe. Pendant la Conférence, au sein de son groupe consacré aux migrations, elle a pu constater la profonde méconnaissance des législations en la matière de la part des citoyens.

À sur France 24 : Portrait : Laura Maria, pour une Europe ouverte, responsable et sans murs

“La plupart des gens ne savent pas grand-chose sur les lois européennes et nationales en ce qui concerne l'immigration. Il est impératif de changer notre façon d'en parler : ce n'est pas une crise.”

Elle a décidé de porter cette idée d’une Europe sans murs mais dotée de mécanismes à l’échelle de l’Union. Lors des dernières réunions en plénière de la Conférence, les députés et représentants des institutions ont retrouvé la Maria Laura des tout débuts de l’événement, attentive, engagée et inflexible, celle qui ne veut pas participer à un simple "coup de com politique". La Conférence n’aura de sens, selon elle, que si les hommes politiques restent à l’écoute des citoyens et de leurs recommandations, offrant à cette expérience citoyenne la place qu’elle mérite.

“Nous voulons être acteurs de ce projet démocratique et être entendus pour que cet événement soit une réussite, et non pas une mascarade.”