Retour au
pays natal

Jumelée avec la Louisiane, le Québec, l’Espagne et plus officieusement, la Bretagne… Joal-Fadiouth est la ville dont sont originaires la plupart des pêcheurs sénégalais installés à Lorient comme Souleymane, Bara ou son cousin Omar, de retour au pays natal après un an d’absence.

Chez les Kane, tout le monde s’affaire aujourd’hui pour préparer le thiéboudienne, le riz au poisson qui nourrit toute la famille chaque midi...

« Le thiof (mérou blanc) c’est pour l’exportation vers l’Europe ou vers Dakar. Nous, nous mangeons les poissons moins nobles, sardinelle, chinchard ou maquereau », précise le cousin de Bara qui a toujours un mot sur tout.

N’empêche, le repas a cette fois-ci un goût particulier. Omar retrouve sa femme et son fils âgé de quelques mois.

« Si j’arrive à faire ce que je veux, dans deux ou trois ans, je vais rentrer définitivement. C’est difficile de vivre loin de sa famille. J’aimerais me réveiller tous les jours ici. Parfois on te dit que ton fils ne va pas bien, ce n’est pas d’envoyer des sous qui règle les problèmes ».

S’il a choisi de faire le même métier que son père, il ne souhaite pas le même avenir pour son enfant : « Mon fils, j’aimerais qu’il devienne footballeur. Quand il aura sept ans, je l’amènerai à l’école de foot. J’aimerais pas qu’il soit pêcheur c’est sûr, je trouve que c’est un métier dur, épuisant et qui devient de moins en moins rentable, j’aimerais bien qu’il s’oriente vers d’autres trucs ».

Plage de Joal-Fadiouth, principal port de pêche du Sénégal.

Omar partage des photos de sa vie en France avec son ami Sabasi, resté au pays.


Comme dans toutes les familles sénégalaises, plusieurs générations vivent sous le même toit avec leurs conjoints et leurs enfants.



Pirogues sur la plage de Joal

La lutte fait partie des distractions favorites des Sénégalais. Certains lutteurs originaires de Joal, comme le célèbre Yekini, étaient pêcheurs auparavant.

Au foyer, un autre frère, Sakura, est déjà parti... Hébergée dans sa belle-famille comme le veut la tradition, sa femme Fatou vit dans l’attente de son retour :

« Être la femme d’un pêcheur qui n’est pas dans son pays, c’est très difficile. Je n’ai pas vu mon mari depuis un an, sauf par téléphone. Et c’est à cause de la pauvreté. Quand il était ici, il ne pouvait aider personne, mais quand il est allé en France, il a pu aider quelqu’un. C’est un acte de bravoure de quitter sa famille et de laisser sa femme seule et ses enfants pour émigrer ».

L’argent qu’Omar envoie tous les mois sert à nourrir le foyer et à payer la pirogue du cadet, qui gagne difficilement sa vie dans la pêche locale…

« Je vais souvent me promener au port. Toutes les conversations tournent autour du matériel de plus en plus cher et du poisson qui diminue. Beaucoup aimeraient partir, ils voient un avenir incertain dans ce métier », déplore Omar.

Tandis qu’il déguste son tiep, son père donne son avis sur l’émigration des jeunes.

« J’étais pêcheur et de mon temps, tout cela n’existait pas ! On ramenait suffisamment de beaux poissons pour nourrir toute la famille. Les jeunes aujourd’hui ne savent pas pêcher ! Ils pillent ce que Dieu leur a donné ».

Fataliste, Omar résume la situation à sa façon, un peu bravache : « Les Sénégalais sont des lutteurs et des aventuriers. On les retrouve dans tous les pays voisins et dans les ports, en Espagne, en France, même en Italie ! Ils vont toujours là où il y a du poisson ».